50 ans de Microsoft : Borland et Icare
mar, 05/08/2025 - 12:18
À partir de 1975, Microsoft s’impose comme l’éditeur référence du Basic. Des dizaines de constructeurs l’installent par défaut sur les ordinateurs. Apple conclut un deal de plusieurs années pour sa commercialiser sur l’Apple II. Jusqu’au début des années 80, Microsoft n’a que peu de rivaux, même si Digital Research concurrence frontalement avec son CBASIC pour CP/M (1976). En 1983, Borland apparaît brusquement et bouscule le marché.

Borland apparaît en août 1981 au Danemark. L’éditeur développe des outils pour CP/M, l’OS référence. Mais le véritable essor est aux États-Unis. Les fondateurs ouvrent une filiale américaine et recrutent Philippe Kahn dès 1982. Kahn tente sa chance aux États-Unis après avoir été le développeur principal des logiciels pour le Micral N et le système SYSMIC. Très vite, Borland veut investir le marché des langages de programmation. Khan a l’ambition de proposer des langages de qualité avec des environnements pour les développeurs. Les investisseurs sont sceptiques. En mai 83, Borland International est créé. En novembre 83, Borland sort Turbo Pascal. Anders Hejlsberg en est le créateur. Ironie de l’Histoire, Anders supervisera la création de C# et de TypeScript.
Turbo Pascal impose rapidement Borland comme une alternative crédible à Microsoft. Tellement crédible, que Borland devient rapidement un redoutable concurrent. En 2 ans, l’éditeur emploie plus de 100 personnes. La réussite vient aussi des tarifs très accessibles : 49,95 $ incluant l’éditeur et le compilateur. Clairement, Borland veut affronter Microsoft et n’hésite pas à casser les prix pour écouler les licences. Le succès est immédiatement : plus de 20 000 ventes !
Avec le succès de l’IBM PC, Borland tente un nouveau marché avec Sidekick. Il s’agit d’un organisateur complet (agenda, bloc-notes, calculatrice) avec une interface type shell graphique. Là encore, l’éditeur connaît un joli succès.
Les relations entre Borland et Microsoft, entre Kahn et Gates sont froides, voire, très mauvaises selon les années. Kahn rêve de surpasser Microsoft. Le Comdex de novembre 1987 serait une des origines du conflit Gates – Kahn suite à un échange tendu. En réalité, dès la sortie de Turbo Pascal, Microsoft se méfie de Borland. Turbo Pascal est vendu peu cher, mais surtout il propose un environnement de programmation complet intégrant le compilateur. Le look atypique de Kahn et la communication agressive font le reste. Le style tranche avec celui de Gates. Clairement, Kahn, rapidement surnommé le « barbare » devient la bête noire de Microsoft.
Au-delà de l’échange du Comdex, Microsoft ouvre l’affrontement contre Turbo Pascal en offrant une réduction de 40 $ aux utilisateurs de l’outil Borland en achetant le Pascal de Microsoft !
En 86, Microsoft lance QuickBasic 2.0. Gates veut s’opposer à Borland et proposer l’équivalent de Turbo Pascal. L’année suivante, Borland répond avec Turbo Basic. En interne, les équipes Microsoft parlent « de la grande erreur de Borland » (Gates, 1994). Au-delà des langages, Borland mise sur les bases de données. En 1987, l’éditeur fait un rachat stratégique : Ansa-Software. L’éditeur développe depuis 2 ans, Paradox. La base connaît un grand succès. Au début des années 1990, Borland, Ashton-Tate et Fox dominent le marché des SGBD. Microsoft en est absent. Borland rachète Ashton-Tate en 1991. Microsoft ne veut pas laisser passer ce marché. L’éditeur rachète alors Fox et son FoxPro (1992) et commercialise Access qui s’imposera comme LE SGBD sur Windows 3.x.
Si Borland domine le marché SGBD, Microsoft reprend la clé du succès de Borland : casser les prix d’Access, vendu seulement à 99 $. Peu à peu, Borland recule. Dans le même temps, Borland se bat sur le marché des tableurs. Lotus, éditeur de 1-2-3, accuse Borland d’avoir copié des fonctionnalités dans Quattro Pro. La plainte est déposée en juillet 1990. Borland modifie rapidement plusieurs éléments de son tableur. Borland perd le procès, de l’argent et son image publique.
Le rachat d’Ashton-Tate mobilise une partie de finances de Borland et le procès avec Lotus ne facilite pas la communication de l’éditeur sur le marché. Dès 1994, Borland plonge : retard sur le développement des nouveaux produits, licenciements, 76 millions $ de perte rien qu’au 1er trimestre de l’année. Pour tenter de rétablir les finances, l’éditeur vend Quattro Pro à WordPerfect pour 145 millions $. Le 11 janvier 1995, Philippe Kahn annonce sa démission de son poste de CEO à la suite d’une opposition sur la stratégie avec le conseil d’administration. Delphi sortira la même année. Son développement est assuré par Anders Hejlsberg. En 1996, Paradox est vendu à Corel et la même année, l’éditeur sort JBuilder. Kahn quitte définitivement Borland en novembre 96.
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