La Commission européenne entame une procédure contre Google pour abus de position dominante

Par:
fredericmazue

mer, 15/04/2015 - 14:49

Ca y est c'est parti ! On pressentait depuis quelques semaines que ça ne tarderait plus, après ces cinq dernières années pendant lesquelles la Commission européenne a enquêté sur les pratiques anticoncurrentielles supposées de Google. Il ne s'agit plus désormais d'enquêter, mais de sévir. Google se voit menacée d'une sanction à hauteur de 10% de son chiffre d'affaire qui a atteint 66 milliards de dollars en 2014.

Google est accusé d'utiliser la position dominante de son moteur de recherche (90% de parts de marché) pour mettre ses propres services en avant dans les résultats de recherche, au détriment de la concurrence.

Dans un communiqué de presse  Margrethe Vestager, la commissaire européenne chargée de la politique de concurrence, a fait la déclaration suivante: «L'objectif de la Commission est d'appliquer les règles de l’UE relatives aux ententes et aux abus de position dominante de manière à ce que les entreprises opérant en Europe, quel que soit leur lieu d'établissement, ne privent pas artificiellement les consommateurs européens d'un choix aussi large que possible ou n'entravent pas l'innovation».

«En ce qui concerne Google, je crains que l’entreprise n'ait injustement avantagé son propre service de comparaison de prix, en violation des règles de l’UE en matière d’ententes et d’abus de position dominante. Google a à présent la possibilité de convaincre la Commission du contraire. Toutefois, si l’enquête devait confirmer nos craintes, Google devrait en assumer les conséquences juridiques et modifier la façon dont elle conduit ses activités en Europe.»

«J'ai aussi lancé une procédure formelle d’examen portant sur le comportement de Google en ce qui concerne les systèmes d’exploitation, applications et services pour appareils mobiles. Les smartphones, tablettes et autres appareils similaires jouent un rôle de plus en plus important dans la vie quotidienne de nombreuses personnes et je veux faire en sorte que les marchés de ce secteur puissent prospérer sans contraintes anticoncurrentielles imposées par quelque société que ce soit.»

Qu'est-ce qui est reproché à Google, plus exactement ? Un autre document le précise :

Dans la communication des griefs, il est allégué que Google avantage ou a avantagé, dans ses pages de résultats de recherche générale, son propre service de comparaison de prix intitulé «Google Shopping» ainsi que son prédécesseur, «Google Product Search», par rapport aux services de comparaison des prix concurrents.

Le comportement de Google peut donc détourner artificiellement le trafic des services de comparaison de prix concurrents et priver ces services de la possibilité de lui faire concurrence, ce qui porte préjudice aux consommateurs et entrave l’innovation.

En particulier, les conclusions préliminaires sont les suivantes:

  • De manière systématique, Google positionne et met en évidence son service de comparaison de prix dans ses pages de résultats de recherche générale, sans tenir compte de son niveau de performance.Ce comportement remonte à 2008.
  • Google n’applique pas à son propre service de comparaison de prix le système de pénalités qu’il applique aux autres services du même type sur la base de paramètres définis, pénalités qui peuvent amener à ce que ces services soient moins bien classés dans les pages de résultats de recherche générale de Google.
  • Froogle, le premier service de comparaison de prix de Google, ne bénéficiait d’aucun traitement de faveur et n’était pas performant.
  • Grâce au traitement de faveur systématique dont ils ont bénéficié, les services de comparaison de prix ultérieurs de Google, à savoir «Google Product Search» et «Google Shopping», ont connu un taux de croissance plus élevé, au détriment des services de comparaison de prix concurrents.
  • Le comportement de Google a une a des effets négatifs pour les consommateurs et l’innovation. En effet, les utilisateurs ne voient pas nécessairement les résultats de comparaison de prix les plus pertinents en réponse à leurs requêtes. Les concurrents sont aussi moins incités à innover, car ils savent que même s’ils fournissent le meilleur produit possible, ils ne bénéficieront pas de la même visibilité que le produit de Google.

Android est également visé par la Commission européenne. Il est reproché à Mountain View d'imposer aux fabricants de smartphones et tablettes d'y installer les applications de Google en leur donnant la meilleure visibilité. Réciproquement, dans le cas où des fabricants souhaitent installer les applications Google, Mountain View est suspectée de s'opposer au développement et à la commercialisation de forks d'Android concurrents. Un nouveau document précise cela :

Plus précisément, sur la base des informations dont la Commission dispose actuellement, l’enquête portera, à ce stade, sur les trois questions suivantes:

  1. Google a-t-elle illégalement entravé le développement et l’accès au marché des applications ou services pour appareils mobiles de ses concurrents en obligeant ou en incitant les fabricants de téléphones intelligents et de tablettes à préinstaller exclusivement les applications ou services de Google?
  2. Google a-t-elle empêché les fabricants de téléphones intelligents et de tablettes qui souhaitent installer des applications et des services de Google sur certains de leurs appareils Android de développer et de commercialiser des versions modifiées et potentiellement concurrentes d'Android (les «forks d'Android») sur d’autres appareils, entravant ainsi illégalement le développement et l'accès au marché des systèmes d’exploitation pour appareils mobiles ainsi que des applications ou services de communication mobile de ses concurrents?
  3. Google a-t-elle illégalement entravé le développement et l’accès au marché des applications et services de ses concurrents en liant ou groupant certains services et applications de Google distribués sur des appareils Android avec d'autres applications, services et/ou interfaces de programmation d'applications de Google?

Cette fois ça risque de chauffer très sérieusement pour Google, à moins que l'entreprise de Mountain View ne réussisse à négocier un accord  l'amiable.