Le logiciel libre : un choix technologique stratégique

Par :
Frédéric Mazué

lun, 25/05/2009 - 13:08

Un point de vue de Pierre Rivenez - Département R&D CELESTE

Pour plus d'efficacité, les entreprises font des choix technologiques stratégiques. Fibre optique versus cuivre pour le haut débit et logiciels propriétaires versus libres pour les systèmes. Voici quelques éléments d'explication pour comprendre cette évolution, voire révolution des systèmes d'information.

Qu'est ce qu'un logiciel libre ?

Il existe actuellement deux types de logiciels : les logiciels libres et les logiciels propriétaires. Les logiciels les plus connus sont ceux de type propriétaires que l'on trouve dans tous les magasins. Certains logiciels libres sont également connus tel que l'environnement Linux créé par Linus Torvalds en 1991. On peut également citer la suite OpenOffice.org ou encore le navigateur internet Firefox de la fondation Mozilla.

Nombreux sont ceux qui estiment qu’un logiciel libre est un logiciel gratuit. Ce n'est pas le concept principal. En effet le logiciel libre fait référence à la liberté d'utilisation du logiciel et non sa gratuité. Il existe en effet des logiciels gratuits qui sont propriétaires (exemple l'anti- virus Avast) et des logiciels libres qui sont payants (Linux RedHat par exemple).

Il existe un organisme chargé d'encadrer le logiciel libre : la Free Software Foundation.
Cette fondation a défini 4 niveaux de liberté pour un logiciel libre, dont elle assure le respect

> La liberté d'exécuter le programme pour tous les usages (liberté 0)

> La liberté d'étudier le fonctionnement du programme et de l'adapter à ses besoins (liberté 1). L'accès au code source est donc une condition requise

> La liberté de redistribuer des copies, donc d'aider votre voisin (liberté 2)

> La liberté d'améliorer le programme et de publier vos améliorations pour en faire profiter toute la communauté (liberté 3). Dans ce cadre, l'accès au code source est une condition requise

Il existe d'autres fondations comme l'Open Source Initiative, qui a créé le concept d'Open Source. La notion d'Open Source permet de lever l'ambiguïté du terme « free » qui signifie aussi bien gratuit que libre.

Les licences

Les logiciels libres sont soumis à une licence libre dans laquelle l'auteur renonce à une grande partie de ses droits d'auteur. Il existe différents types de licence libre :

> le domaine public C'est un logiciel qui appartient à tout le monde. Un logiciel appartient au domaine public quand les droits d'auteur sont terminés ou que l'auteur y renonce.

> les licences BSD Ce type de licence permet de disposer d'un logiciel libre et d'en faire ce que l'on souhaite ; même le transformer et le redistribuer sous forme non libre.

> les licences GNU Les logiciels sous ce type de licence peuvent être utilisés librement mais ne peuvent être redistribués que sous le respect du copyleft (utilisation et modification du logiciel à la seule condition de ne pas y apporter de restriction).

En quoi diffère un logiciel libre d'un logiciel propriétaire ?

Les logiciels libres permettent un accès aux sources. Pour les logiciels propriétaires, une fois compilés, il est difficile de modifier un programme. Quand vous achetez un logiciel propriétaire, seule l’utilisation est possible - pas l’étude de son fonctionnement. On ne peut donc pas évaluer véritablement son fonctionnement et les scripts exécutés. Par exemple, une application peut récupérer des données personnelles, les transmettre sur Internet sans que son utilisateur ne le sache.

Pourquoi il peut être difficile de passer à une solution libre ?

Les solutions libres sont des solutions assez récentes. Les utilisateurs en entreprise sont habitués à des solutions propriétaires et le changement peut s'avérer difficile pour une entreprise. On peut souligner deux problèmes majeurs :

> Le coût de formation peut être élevé. La plupart des utilisateurs n'ayant travaillé que sur certains logiciels ils ont besoin de formations poussées pour passer à de nouveaux logiciels. La formation peut s’avérer parfois longue et coûteuses.

> Passer à Linux peut poser problème car tous les logiciels ne sont pas compatibles. La plupart des logiciels propriétaires utilisés par les entreprises n'ont pas été prévus pour fonctionner de manière stable sur un environnement libre. Certaines données devront être exportées vers des nouveaux supports. Cela requiert du personnel avec de compétences à former ou embaucher.

Les difficultés pour le logiciel libre à s'imposer sont également dues principalement à son image. Beaucoup de gens ont confiance en des logiciels propriétaires édités par de grandes compagnies. Les logiciels sont présents sur le marché depuis de nombreuses années, gage de sécurité. Les logiciels libres sont encore trop souvent considérés comme des applications développées par des communautés d'amateurs pour des besoins personnels ou pour un public éclairé. Ce n’est évidemment pas le cas : des solutions comme la distribution Linux Ubuntu ou la suite Open Office est distribuée par des sociétés multinationales capables d'apporter un support adapté aux entreprises et aux particuliers.
Les logiciels libres bénéficient au même titre que les logiciels propriétaires de support officiel mis en place par les sociétés ou fondation qui les distribuent.

L’autre difficulté majeure pour le logiciel libre est la « vente liée ». En effet, lorsqu'on achète un ordinateur celui ci est dans la majorité des cas livré avec un système d'exploitation et un ensemble de logiciels propriétaires (suite bureautique, logiciel de lecture audio et vidéo ...). Un grand nombre de personnes ne souhaitant pas modifier la configuration d'origine… le monopole de certains logiciels s’en trouve accentué.

Pourquoi utiliser des logiciels libres ?

Cependant malgré ces inconvénients, utiliser des logiciels libres présente des intérêts multiples. Ils sont fondés sur des valeurs de transparence et d’évolutivité. Les avantages qu’ils portent sont donc nombreux pour ceux qui souhaitent exploiter leurs fonctionnalités.

Ainsi, les logiciels libres utilisent des formats ouverts : en plus de leur évolution possible, ils permettent une meilleure interopérabilité entres les applications. Par exemple, pour la navigation sur Internet, les logiciels libres essaient de respecter au maximum les recommandations du W3C (World Wide Web Consortium).

Au point de vue de la sécurité, le code source est ouvert ce qui n’est pas une faille de sécurité. Au contraire, le code étant accessible à un grand nombre de personnes, il est en constante amélioration et les failles de sécurité sont détectées et corrigées plus rapidement.

L'utilisation de logiciel libre permet de savoir ce qui est réellement exécuté. Outre l'aspect sécurité, cela garantit le respect de la vie privée. En effet, on peut voir tout ce qui est exécuté par les applications et il est alors facile de contrôler les actions effectuées.

Le fait de choisir des logiciels libres permet également de lutter contre les monopoles de certaines multinationales qui veulent imposer leurs produits et leurs tarifs.

L'ouverture possible des logiciels libres permet des évolutions et des innovations. En effet, de nombreuses communautés peuvent travailler sur le même logiciel sans contrainte. Les innovations sont ainsi mutualisées et enrichies par tous. Le but de ces communautés n'étant pas de faire du profit, cela permet la création de logiciels plus variés.

La place du logiciel libre :

La part du logiciel libre est encore très faible : 1% de personnes utilisent Linux sur leurs ordinateurs personnels. La version « desktop » reste la version la moins utilisée au profit de la version serveur.
Par exemple pour les serveurs HTTP, la solution libre Apache est présente sur environ 50% des machines. Le serveur Apache est relié à des solutions Web comme PHP et de base de données comme MySQL qui ont eu aussi une place très importante dans le monde du libre (50 000 téléchargements par jour de MySQL).

Les logiciels libres sont des solutions qui se mettent en place facilement et qui sont utilisables sur la majorité des systèmes d'exploitation. Leur développement se ferra donc sur la base de ces atouts dans un contexte économique financièrement plus aigu pour les entreprises.

CONCLUSION

Malgré une très forte utilisation de logiciels propriétaires dans les entreprises et par les particuliers, le logiciel libre a un bon avenir
devant lui.

En 2008 il pesait environ 35 milliards d'euro et le nombre de personnes formées à Linux (serveur) a été multiplié par 2,5 entre 2005 et 2008. On constate également que de plus en plus d'administrations et de collectivités ont fait le choix d'installer une solution Linux.

Le logiciel libre est avant tout un état d’esprit et permet :

> Une nouvelle approche de l’informatique moins dominée par des monopoles avec une vision à la fois commerciale et de partage

> Un choix stratégique pour une entreprise : gestion des coûts (licences) mais intégration de compétences en interne pour gérer les évolutions et permettre notamment des projets innovants.

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Frédéric Mazué