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Développeur fullstack : mythe ou réalité, interview avec Nathaniel Okenwa (Twilio)

Par:
francoistonic

mer, 10/09/2025 - 15:13

Le développeur fullstack est une sortie d'OVNI à la réalité multiple. Mythe ou réalité ? Nous avons posé la question à Nathaniel Okenwa, Developer Evangelisy chez Twilio

Doit-on encore parler de développeurs full stack ? N’était-ce pas une illusion depuis le départ ?

Nathaniel : Je dirais que ce n’est pas tant une illusion qu’une question d’échelle. Les startups et les petites entreprises ont souvent besoin d’un développeur full stack, c’est-à-dire de profils capables de comprendre solidement l’ensemble des différents composants d’une application logicielle. Dans les grandes entreprises, la spécialisation devient rapidement indispensable.

Ce qui a changé, c’est que la « stack » s’est élargie. Même dans ce cas, un développeur tire avantage d’avoir une bonne compréhension des autres parties du système. Par exemple : est-ce que chaque développeur backend doit connaître en profondeur le cycle de rendu de React ? Pas forcément. Mais doivent-ils comprendre clairement comment leurs données sont consommées et comment les requêtes sont générées ? Absolument. Cela suppose aussi de comprendre comment ces requêtes se traduisent en engagement et ce que cela implique en termes de fiabilité, de latence et d’expérience utilisateur.

Il est également courant de voir des développeurs juniors commencer en full stack avant de se spécialiser, au fur et à mesure que leur carrière et les applications grandissent. En ce sens, le rôle de « développeur full stack » n’est pas un mythe mais plutôt une étape nécessaire dans le parcours qui mène à devenir les ingénieurs, architectes et CTO qui conçoivent les applications de demain.

Enfin, avec les outils de co-pilotage par l’IA, la productivité va exploser. Les développeurs prendront en charge des périmètres plus larges, en se concentrant davantage sur l’architecture — décider comment les « briques de Lego » s’assemblent — tout en déléguant la création de ces briques à l’IA.

Aujourd’hui, le développement est un “mille-feuille” de technologies, de langages et de frameworks. N’est-il pas temps d’abandonner la notion de full stack face à cause de cette réalité ?

Nathaniel : Le développement est effectivement devenu un univers très dense. On a l’impression qu’une nouvelle tendance de framework apparaît tous les deux ans. Mais paradoxalement, ces outils ont rendu le développement full stack plus accessible, et non l’inverse. Une grande partie de la complexité est absorbée par des plateformes qui standardisent les parties difficiles comme le cloud, le serverless, la data ou l’engagement client, ce qui permet aux développeurs de travailler à un niveau plus élevé.

Aujourd’hui, les développeurs travaillent souvent autour de produits, de cas d’usage ou de fonctionnalités, avec la liberté de choisir le « meilleur outil pour la tâche ». Une compréhension plus large des technologies leur permet de rester flexibles et de collaborer entre équipes, ce qui est précisément l’esprit du full stack.

Comment un développeur peut-il se spécialiser aujourd’hui ? Sur un langage, un framework ou un type de développement ?

Nathaniel : Je ne pense pas que les développeurs du futur se définiront par un seul langage ou framework. Nous évoluons vers un niveau d’abstraction plus élevé : réfléchir en termes de systèmes et de leurs interactions. L’IA accélère l’écriture de syntaxe, l’apprentissage de nouveaux frameworks et même de nouveaux langages.

Cela dit, cette montée en puissance du généraliste rend la spécialisation encore plus précieuse. Je compare souvent cela au domaine médical : les généralistes gèrent la majorité des cas, mais lorsque le problème exige une expertise approfondie, ce sont les spécialistes qui interviennent. Pour les développeurs, devenir la personne de référence pour le débogage ou les problèmes techniques complexes dans un domaine précis de la stack est une voie forte de spécialisation.

En conclusion, tous les développeurs n’auront pas besoin de se spécialiser. Mais ceux qui cultivent une expertise approfondie resteront très recherchés, même si l’architecture devient plus démocratisée.

Prenons le cloud comme exemple : il y a 4–5 ans, un développeur pouvait maîtriser un hyperscaler entier comme Azure ou AWS. Aujourd’hui, il existe des centaines de services. Les développeurs doivent-ils se concentrer sur un nombre limité de services ?

Nathaniel : La prolifération des services cloud illustre parfaitement à quel point la tech est devenue complexe. Au début, certains développeurs pouvaient maîtriser un hyperscaler entier. Mais à mesure que les services se sont multipliés, devenir expert en tout est devenu irréaliste.

Cela ne signifie pas que les experts cloud vont disparaître, mais ils seront une minorité. Pour la plupart des développeurs, il est plus utile de comprendre comment les pièces s’imbriquent que de mémoriser les détails de chaque service. D’autant plus que les MCP et de nouveaux outils masquent une grande partie de la complexité de l’infrastructure.

Ma recommandation aux développeurs serait de se concentrer sur un ensemble limité de services, ainsi que sur les schémas qui permettent de composer et d’échanger des briques au besoin. La compétence gagnante n’est pas la mémorisation, mais la pensée systémique et la capacité d’apprendre à la demande.

Comment voyez-vous l’évolution future du rôle du développeur ?

Nathaniel : Le monde du logiciel évolue rapidement. Savoir générer de la syntaxe ne suffit plus. Les développeurs doivent comprendre l’architecture, les flux de données et la logique métier pour prospérer.

À mesure que les outils de productivité élargissent leur périmètre, les responsabilités des développeurs s’étendront aussi. Les meilleurs seront ceux capables de prendre du recul, de voir la vue d’ensemble et de concevoir des applications robustes et scalables — pas seulement d’écrire du code.

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